Le
Messie sur les genoux du prophète
Pr. Jorge
Pinheiro, PhD
Luc
2.22-32 – “ Et, quand les jours de leur purification furent accomplis,
selon la loi de Moïse, Joseph et Marie le portèrent à Jérusalem, pour le
présenter au Seigneur, suivant ce qui est écrit dans la loi du Seigneur: Tout
mâle premier-né sera consacré au Seigneur et pour offrir en sacrifice deux
tourterelles ou deux jeunes pigeons, comme cela est prescrit dans la loi du
Seigneur. Et voici, il y avait à Jérusalem un homme appelé Siméon. Cet homme
était juste et pieux, il attendait la consolation d'Israël, et l'Esprit Saint
était sur lui. Il avait été divinement averti par le Saint Esprit qu'il ne
mourrait point avant d'avoir vu le Christ du Seigneur. Il vint au temple,
poussé par l'Esprit. Et, comme les parents apportaient le petit enfant Jésus
pour accomplir à son égard ce qu'ordonnait la loi, il le reçut dans ses bras,
bénit Dieu, et dit: Maintenant, Seigneur, tu laisses ton serviteur S'en aller
en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu ton salut. Salut que tu as
préparé devant tous les peuples. Lumière pour éclairer les nations, Et gloire
d'Israël, ton peuple ”.
Introduction
Une
fête des Lumières
Dans les pays européens, y compris la France, il existe une coutume de célébrer un festival chrétien appelé la Chandeleur. Il est célébré le deuxième jour de février, soit environ quarante jours après Noël. L'expression chandeleur vient du latin et signifie bougie. Elle rappelle que ce garçon juif palestinien est la lumière du monde.
Dans les pays européens, y compris la France, il existe une coutume de célébrer un festival chrétien appelé la Chandeleur. Il est célébré le deuxième jour de février, soit environ quarante jours après Noël. L'expression chandeleur vient du latin et signifie bougie. Elle rappelle que ce garçon juif palestinien est la lumière du monde.
La célébration de la Chandeleur célèbre la présentation de ce garçon de la périphérie palestinienne dans le temple de Jérusalem, car de la vieille tradition juive, chaque premier-né devrait être conduit au temple, quarante jours après sa naissance, pour être consacré à l'Éternel Dieu. Cette période de quarante jours correspondait également à la période de protection des mères à qui il était interdit par la loi sur la religion juive de se rendre au temple pendant les jours qui suivaient l'accouchement. Ainsi, une fois le temps passé à l'abri terminé, ils devraient se rendre au temple pour dédier un sacrifice à l'Éternel Dieu et être déclarés purs par le prêtre. Par conséquent, la fête est aussi la fête de la purification de Marie, la mère de Jésus.
Le jour où Marie et son mari Joseph amenèrent Jésus au temple, l'apôtre Luc, biographe des actes de Jésus, se souvint, un homme qui s’appelait Siméon s'y rendit, conduit par l'Esprit de l'Éternel Dieu, sous la promesse qu'il ne mourrait pas avant voir le Messie. Il plaça Jésus sur ses genoux et dit qu'à ce moment-là, l'Éternel Dieu pouvait le laisser mourir en paix. Car il avait vu le salut que le Seigneur Dieu avait préparé à être la lumière des nations et la gloire d'Israël.
C'est la fête de la Chandeleur, célébrée avec des bonbons et des crêpes et même contre les traditions religieuses nous inspirent, pas à la lueur des bougies de la Chandeleur, mais à la lumière du garçon qui est devenu le rabbin de la périphérie palestinienne. Et que nous appelions le Maître Jésus, le Messie.
Et dans cette optique, nous allons méditer sur le miracle qui s'est produit dans la vie de Siméon. Ce qui signifiait mettre un nouveau-né dans l'utérus, fragile et dépendant de sa mère et des personnes qui l'entouraient, comme tous les nouveau-nés. Réfléchissons calmement, vivons ce moment, comme le fit Siméon, comprenant que ce petit moment vous bénira comme un défi de penser et de vivre. Comme, rappelez-vous les bougies et les torches qui éclairent les chemins. Et ainsi vous et moi serons aussi sous les lumières de Jésus le Messie.
Parcourons ce texte de Luc comme un homme qui parle avec un compagnon de voyage et laissons-nous la conversation tournée autour du voyage lui-même. Et nous le ferons à travers ce texte fondateur de la foi chrétienne "Le Messie sur les genoux de Siméon".
1.
L’Israël sous l'empire romain
Dans
nouveau millénaire, nous voyons la vie vécue comme si elle n’avait aucune
valeur. Nous voyons, au nom de la politique et de la religion, des personnes
transformées en tueurs en série, légaux ou non, et répandant la douleur, la
souffrance et la mort. Mais si une telle réalité a traversé la modernité
occidentale, du moins depuis le milieu du XIXe siècle, une situation tout
simplement terrible faisait partie de l'histoire d'Israël.
À
partir du milieu du dix-neuvième siècle, notre monde occidental a commencé à
souffrir de pensées logico-mathématiques et naturalistes qui minaient la
liberté des personnes et des communautés, même des communautés chrétiennes.
Ainsi, le rationalisme analytique a transformé tout en objet de calcul et de
contrôle, y compris les personnes. De la même manière, l'humanisme sécularisé
séparait le peuple et le monde du mystère suprême de l'existence: du Créateur
et de son Messie. C'est-à-dire que la pensée logique et naturaliste, ainsi que
l'humanisme sécularisé, ont construit un nouveau monde plein de biotechnologie,
mais inhumain et sans âme.
Quelque
chose de similaire, sans doute terrible, est arrivé au peuple d'Israël au cours
de la vie de Siméon. Elle était dominée par un empire cruel et idolâtre,
l’empire romain. Il a vu des troupes étrangères entrer dans les lieux saints,
violer les filles juives, asservir des personnes, exiger des taxes élevées et
jeter leurs adversaires dans les cachots. Et il a également vu ses dirigeants
incliner la tête et suivre fidèlement les ordres des envahisseurs. C'était des
moments de douleur, de souffrance et de honte. Moment de crier à l'Éternel Dieu
pour la libération.
Les
hommes et les femmes pieuses ont crié dans leurs prières pour une puissante
intervention de Dieu pour sauver l’Israël. Et des militants opposés à l'Empire
romain se sont organisés en groupes pour combattre la présence militaire sur ce
pays qu'ils considéraient comme sacré. Les prières des pieux et les actions militantes,
parfois violentes, n'étaient pas gratuites, ni le produit d'un simple désir,
mais elles étaient enracinées dans le tissu historique du mouvement
prophétique. La dimension négative de la condition humaine sur la terre
d'Israël appelait une action radicale pour que la nation devienne libre.
Ainsi,
le climat était tendu et la situation évoluait vers une guerre de libération.
Ce qui n’était pas nouveau. Depuis des siècles, lorsque le roi séleucide
Antiochos IV dominait d’un bras de fer, la Judée devenait le théâtre d’une
révolte juive initiée par une famille de prêtres, Mattathias et ses 5 fils,
surnomme les Maccabées (en hébreu ''marteau''). Ils se sont battus pour la
liberté d'adorer l'Éternel Dieu conformément aux lois et aux traditions du
judaïsme, face à une entreprise exacerbée par le roi. La révolte des Maccabées
a pour sujet progressivement une grande indépendance politique accordée aux
juifs, un prix total du pouvoir. Cette insurrection constitue la fête juive des
Lumières (Hanoukka), la célébration de la victoire de Mattathias et ses fils
sur les séleucides. Et les gens d’Israël se sont tous souvenus de ces temps
héroïques.
Mais
à côté du souvenir de ces luttes nationales historiques, les promesses de
l'arrivée du Messie ont réchauffé les cœurs ... Et un vieillard, déjà brisé par
les années, s'est reposé sur une promesse : (Isaïe 9: 5) "Car un enfant nous est né, un fils nous est
donné, et la domination repose sur son épaule; Sur l'appellera Admirable,
Conseiller, Dieu puissant, Père éternel, Prince de la paix".
Le
récit biblique décrit Siméon comme un homme juste et pieux, qui assistait à la
consolation d’Israël et qui avait l'Esprit-Saint sur lui. Toujours dans le
récit de Luc, Siméon avait été averti par Dieu qu'il n’avait jamais vu auparavant.
Siméon
est venu au temple de Jérusalem pour annoncer à Joseph et Marie que leur petit
fils est la lumière des nations. Sa prophétie fait d'abord une allusion au
récit de la Passion. Parlant à Marie, il lui annonce qui seront transpercées
par une épée au pied de la croix.
2.
Un prophète inconnu
Le
temps des prophètes était achevé depuis longtemps au temps des événements
relatés, mais rien n’est jamais terminé quand il s’agit de la
révélation de Dieu. Venus du fin fond des âges deux vieillards, Siméon et Anna,
d’une fidélité irréprochable, prophètes inconnus jusqu’alors, s’avancent sur la
cène de l’histoire pour saluer un temps nouveau. À peine entrevues, ils
retourneront dans l’oubli, mais les paroles de Siméon seront retenues
ici, comme un préambule à l’Évangile dont la première page n’est pas encore
écrite.
L’essentiel
du message de Jésus est donné d’emblée ici par ce vieillard qui parle en
prophète : « Cet enfant est là pour la chute et le relèvement de beaucoup
en l’Israël et sera un signe qui provoquera la contradiction ». En une
formule lapidaire il résume tout l’Évangile qui n’a pas encore été prononcé.
Désormais, aucun homme ne pourra tomber sans que son redressement ne soit pas
une priorité pour Dieu. Notre vie s’ouvre donc sur la promesse que Dieu mettra
tout en œuvre pour nous sortir d’affaire en cas de chute. Mais les hommes
répondront-ils à sa mobilisation?
On
oublie bien souvent cet épisode qui passe presque inaperçu dans la Bible. Mais
c’est parce que l’événement est discret qu’il faut insister dessus. En général
c’est par des interventions qui ne sont pas visibles que par ceux qui en sont
dépositaires que Dieu révèle aux hommes le sens qu’il veut donner au cours de
l’histoire. C’est aux hommes ensuite à le mettre en œuvre. Siméon attendait,
comme tous les Juifs que Dieu intervienne dans l’histoire de son peuple. Il lui
suffit d’une seule phrase pour que tout l’avenir s’éclaire d’un sens nouveau :
« Il est là pour la chute et le
redressement de beaucoup ». Cette phrase prononcée, Siméon peut
quitter le monde des vivants.
Quand
nous nous interrogeons sur le sens de notre vie et que nous nous demandons à
quoi nous servons réellement, il nous suffit de nous souvenir que le destin de
Siméon n’était certainement pas écrit à l’avance d’une manière claire et
précise, mais il lui a suffit, au soir de sa vie, de dire une seule phrase pour
que son existence prenne du sens. Nous avons tous un rôle à jouer dans ce
monde, ne serait-ce que celui de prononcer une seule parole, encore faudra-t-il
la prononcer au bon moment.
Siméon
semble avoir dit les choses au bon moment : « Il est pour la chute et le redressement de beaucoup! » Ainsi
Dieu promet-il d’agir de telle sorte que ceux qui sont tombés puissent se
redresser et entrevoir une planche de salut ! C’est tout un programme. La mise
en œuvre de cette promesse provoquera une telle contestation dans le monde, que
Marie sera déchirée jusqu’au plus profond d’elle-même. Les hommes préféreront
se diviser entre eux au risque de défigurer la communauté de Dieu plutôt
que de se mettre au service de l’Évangile, c’est-à-dire au redressement des
plus faibles.
3.
Un Dieu du coté des faibles
Les
mots que Siméon vient de prononcer et qui constituent le tout premier élément
de la vocation de Jésus ne sont pas nouveaux. La tradition biblique avait
enseigné toujours que Dieu se rangeait du côté de ceux qui sont tombés et qu’il
prend toujours le parti des faibles contre les forts. C’est par ce constat qu’a
commencé l’histoire d’Israël: celle d’un petit peuple d’esclaves libérés par
Moïse. Mais pour qu’une telle promesse se réalise, il faudra toujours
qu’il y ait quelqu’un pour accomplir le travail de libération.
Siméon
et d’autres prophètes avant lui savaient que la volonté de Dieu était que
chacun se mette au service des plus humbles, mais que cette volonté
resterait sans suite si personne ne mettait la main à la pâte. Les hommes
ont toujours eu du mal à considérer que tout devait commencer par là. Pour la
première fois dans l’histoire du monde, un vieillard pressent que l’enfant
qu’on lui présente porte en lui la capacité de renverser le cours de l’histoire
en faveur des déshérités, car c’est par là que commence la nouveauté.
Il
sait cependant que tout cela ne se fera pas sans mal, c’est pourquoi, il parle
de contradiction. Les désirs de Dieu correspondent rarement aux souhaits des
hommes. Le rôle de Jésus a été de les mettre en accord au péril de sa
vie. Siméon comprend avant les autres que ce sera difficile, que les hommes se
déchireront entre eux à cause de la dimension sociale et humanitaire que va
prendre l’action visible de Dieu dans le monde des êtres humains. L’amour de
Dieu relayé par l’action des hommes se manifestera en premier lieu par le souci
des humbles. C’est la vocation que Dieu donne à celui qui pour le moment n’est
qu’un bébé et que les nations salueront plus tard sous le titre de Fils de
Dieu.
C’est
sur lui que se porteront les premiers coups, parce qu’on l’a accusé de mépriser
le bien fondé des gens au pouvoir et de discréditer le culte et
la tradition, au profit de l’amour du prochain. N’est-ce pas encore aujourd’hui
un sujet de discorde entre ceux qui donnent priorité aux œuvres et ceux qui
croient que priorité doit être donnée au culte, alors que les deux doivent se
confondre en une même action. Quand Jésus lui-même sera tombé, c’est Dieu qui
le redressera, car l’action de Dieu s’imposera désormais comme un défi à la
mort. Mais cela ne s’imposera pas sans mal.
Si
Siméon continue sa prophétie en disant à Marie qu’elle sera divisée
jusqu’au plus profond de son âme, c’est parce que les hommes eux-mêmes
préféreront se diviser entre eux, diviser leur héritage spirituel, diviser
l’Église plutôt que de répondre à cette vocation de charité qui doit
régénérer le monde en faisant de tous les hommes nos prochains, même ceux qui
ne pensent pas comme nous.
Conclusion
À
côté gauche de la poitrine
Ou comme a dit le poète brésilien Milton Nascimento : « Un ami est quelque chose à garder, sur le côté gauche de la poitrine, même si le temps et la distance disent « non » , même en oubliant la chanson, c’est que compte c’est d’écouter la voix qui vient du cœur ».
Mais pour se mettre à leur service, encore faut-il que nous ayons expérimenté en nous-mêmes cette transformation que Jésus peut entreprendre. Il s’agit de nos propres expériences quand nous aussi avons éprouvé le besoin d’être secourus dans nos difficultés. Je pense à ceux qui se sentent en désaccord avec eux-mêmes et à ceux qui sont tiraillés entre les exigences du moment et celles de leur foi. Je pense à ceux qui ne savent pas trouver le sens de leur vie et qui ne sont pas satisfaits du cours que prennent les choses dans leur existence. Je pense aussi à ceux qui se fourvoient parce qu’ils font semblant de croire qu’une vie réussie est une vie couronnée d’honneurs et de privilèges, et qui considèrent que la réussite sociale est un cadeau du ciel si non de Dieu! A tous, Jésus promet de les aider à jeter un autre regard sur leur vie qui les transformera et les rendra aptes au service des autres.
C’est
pour tous ceux-là aussi que Jésus, reçoit vocation d’intervenir dans la vie. Il
est capable de mettre du baume sur les parties douloureuses et il ouvre devant
les pas de chacun une perspective d’espérance. En tout temps, prenez donc le
temps de laisser Jésus naître dans vos âmes, ouvrez-lui votre cœur pour qu’il
s’en empare. Cela prend du temps, cela demande parfois du renoncement. Cela
demande que l’on se remette à prier, même si on ne sait plus le faire.
Mais c’est à ce prix-là que l’Évangile manifeste sa capacité de changer le
monde.
C’est
alors que le mystère de la prière prendra toute sa signification et son
efficacité. Elle permet de s’ouvrir au Seigneur pour qu’il prenne en charge nos
chutes. C’est alors, que sans que nous nous en rendions compte il commence à
transformer notre vie et à nous ressusciter. Ainsi s’ouvre devant nous le
programme d’une vie nouvelle habitée par Jésus et joyeusement ouverte aux
autres et à Dieu.
Et
pour ça, nous pouvons dire comme le prophète Siméon :
« Car
mes yeux ont vu ton salut. Salut que Tu as préparé devant tous les
peuples. Lumière pour éclairer les nations, et gloire d'Israël, ton peuple ».
Prions :
Au
nom de Jésus, nous disons : Seigneur, Tu nous as fait ce don plus précieux que
la richesse, Tu nous as donné la vie ! Pour ces poumons qui respirent,
pour ce cœur qui bat. Pour ces regards, ces sourires, pour le moindre geste, le
moindre pas. Pour toute cette vie en nous, à chaque minute, à chaque seconde. Pour
toute cette vie en lui, l’inconnu, le passant, l’ami. Pour ce miracle quotidien
qui n’étonne plus. Pour ce cadeau merveilleux qui n’éblouit plus. Pour ta
bonté, sans cesse renouvelant la vie. Pour ton Amour et ta Grace, sans cesse
multipliant la vie : nous disons merci.
Amen.